25 avril 2012

Kemonozume : un anime saignant et cru à dévorer à pleines dents !


Le Japon actuel. Des monstres se dissimulent parmi nous. Des créatures qui nous ressemblent, vivent au cœur de notre société. Quand la faim les tenaille, leur appétit instinctif pour la chair humaine les transforme en bêtes sauvages. Une organisation secrète, le Kifûken, existe pour lutter contre ses êtres et pratique un art martial dédié. Leur crédo : seller le démon qui est en nous, et accessoirement, tuer du monstre.

Faim d'amour et de chair

Le beau et la bête
Alors qu'une vague d'apparition de shokujin (ogre mangeur d'hommes) sans précédent ravage le pays, le Kifûken vacille. Momota, son leader vieillissant doit passer le flambeau à l'un de ses deux fils.

Le plus jeune, Kazuma, soucieux de s'adapter au monde contemporain, se tourne vers la science pour combattre la menace. Il veut réformer l'organisation, la moderniser. L'aîné, Toshihiko, obsédé par la tradition et l'idéal de devenir plus fort, semble tout désigné pour la succession. Il ignore les regards amoureux de Rie, la seule femme de l'organisation qui, contre ses aspirations profondes, est préposée aux tâches ménagères.

Toshihiko semble le parangon de la force morale, d'une droiture à toute épreuve ; mais quand il croire la ravissante Yuka – qui croque de l'humain à ses heures perdues – le coup de foudre est réciproque. Leur histoire d'amour passionnée les consument alors que les shokujin continuent de se multiplier et de menacer les vies humaines. C'est alors que le leader du Kifûken est retrouvé mort, assassiné...



Le scénario, résumé ainsi, paraît très sérieux et tragique. Assez commun aussi. C'est sans compter tout les éléments délirants, baroques et souvent glauques qui se greffent joyeusement pour constituer une œuvre très particulière, où la monstruosité devient la normalité. Le titre Kemonozume signifie les griffes de la bête. En effet, si on ampute les shokujin de leur bras, les privant ainsi de leurs griffes, ils cessent d'être gouvernés par des pulsions cannibales.

Des pêches et des crocs

Si l'histoire de Kemonozume reste axée sur l'amour impossible entre un humain et une ravissante ogresse, la série présente une galerie de personnages secondaires bien travaillés. Ils oscillent souvent entre folie et fanatisme, avec des motivations multiples et imbriquées. Les relations familiales sont pourries pas les ambitions inavouées, les amours contrariés, les drames passées.
Entre les hommes du Kifûken, c'est un fraternité qui se fissure, se dénature et dévoile la noiceur des sentiments humains étouffés : jalousie, envie, tromperie...

La composition de la série est tout simplement parfaite. Elle met en place rapidement les éléments nécessaires à la compréhension. La trame devient de plus en plus complexe avec des flash-back intégrés avec intelligence et des petits digressions qui servent toujours la narration. L'univers s'étoffe ainsi et les personnages gagnent en épaisseur. On devine rapidement qu'une manipulation politique de grande ampleur assombrit l'avenir du Kifûken déjà incertain.

Autre surprise de la série, elle reprend à sa sauce épicée la fable populaire de Momotarô. Ce conte cristallise la notion de courage et bravoure. L'incorporation d'élément comme la pêche et le singe donne un aspect humoristique inattendu. Le héros souffre aussi de problème d'incontinence à des moments particulièrement cruciaux, rendant Kemonozume encore plus déjanté et bizarre.



Une expérience visuelle de junkie

La série démarre sans finesse, avec un parti pris graphique fort, de la violence qui flirte avec le gore et une très forte dimension sexuelle. Bref, un anime franchement pour adultes mais d'un abord très étrange et volontairement bordélique.
 Avec le génial Yuasa Masaaki à la réalisation, cette série de 13 épisodes ne pouvait qu'être un OVNI. Quand au dessin, avec Ito Nobutake au chara-design, il plaira plus aux amateurs de comics underground et de Bill Plympton qu'aux fans habituels de la japanim bien lisse.


Kemonozume demande de ranger au placard ses préjugés et ses attentes pour apprécier d'un œil neuf et curieux une animation absolument terrible, vive et fluide, sans concession d'ordre esthétique. La bande originale épouse aussi cette univers sous acide avec une musique swing jazz teintée d'accords punk. Elle rehausse et accompagne avec justesse les délires visuels et scénaristes.

Kemonozume sort des sentiers battus. Son graphisme étonnant rebute les timides et bouscule les conventions ; son scénario faussement linéaire remue la lie des sentiments humains, interroge sur la force qui nous anime.



Une série qui dépeint des personnages dévorés de l'intérieur, affamés de pouvoir, d'amour, de reconnaissance. En final, monstres cannibales et humains partagent plus que leur apparence...
Pour ceux que le générique de début intrigue, le titre Auvers est très probablement une référence à Van Gogh, ce qui, vu la patte graphique très impressionniste, me paraît probable.

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Pour les curieux :
Très bon article sur les travaux de Yuasa Masaki chez Jevanni





23 avril 2012

H comme horizon



Horizon d'après Le petit Larousse 2006 : n.m (du grec horizein, borner) 1. Ligne imaginaire circulaire dont l'observateur est le centre et où le ciel et a terre ou la mer semblent se joindre. 2. Partie de la terre, de la mer ou du ciel que borne cette ligne. 3. Fig. Domaine d'une action ou d'un activité quelconque ; champs de réflexion ; perspective d'avenir.



Horizon rime avec perception, espace, liberté.
Horizon est la merveilleuse incertitude d'ignorer l'étendue du territoire qui s'offre au regard, que ce soit un paysage réel ou intérieur. Il est des périodes où je me sens privée d'horizon, amputée dans mon inspiration, limitée par l'étroitesse de mon foyer et mon esprit exigu qui n'arrive pas à prendre une respiration profonde.
Difficile de s'épanouir dans le bitume et la boue.
Difficile de grandir quand l'atmosphère exalte plus de polluant toxique que d'oxygène.




Alors, je fouille dans mes photos. Je me rappelle du moment serein où j'appuie sur le déclencheur. Je me rappelle de l'odeur de la terre mouillée, de la mer. Le chant des vagues ou le murmure lointain des voitures qui se mêle au vent.
La ligne d'horizon est tantôt de bois, de pierre ou d'eau.
Toujours changeante.
Parfois dansante dans une soleil trop lumineux. Elle appelle à la découverte, à l'ouverture. Son immensité, son éternité rassure.
J'ai besoin d'un horizon lointain pour me sentir vivre, me sentir bien.


Abécédaire est un projet en collaboration avec Anne, la trouveuse de mot, et Virginie Blancher.

16 avril 2012

Japonisme : 回り道 - mawari michi




En ville, trop souvent nos jambes nous mènent à un point d'arrivée, un objectif. On l'atteint le plus rapidement possible, et la ligne brisée par les immeubles et les feux de signalisation tend à être la plus droite possible.
Quand je me déplace dans Paris, souvent à pied, je profite quand même du temps que la lenteur de ce transport me donne. J'écoute de la musique, un livre audio, je regarde l'architecture ambiante.
Pourtant, si le trajet est habituel, je finis par emprunter toujours les mêmes routes, traverser aux mêmes coins de rue. Éviter le boulevard bruyant. Marcher sur ce trottoir-ci plus large et plus propre. L'acte de marcher devient presque aussi mécanique que le métro.

Rapide, nerveux.




Jeudi, je suis sortie de mon rendez-vous chez madame B. Au dessus de ma tête, un ciel où les nuages se racontent plein d'histoires et où parfois, le soleil se joint au dialogue. La température d'avril mérite de garder sa petite laine. Le trajet du retour me prend une petite heure, d'un bon pas.

Dans mon sac, mes appareils photos.
Dans ma tête, le thème du projet photo japonisme tournicote sans cesse. 回り道 - mawari michi. Détour. Le chemin qui tourne. Qui serpente. Le chemin qui s'échappe et vit sa vie, nous surprend.

Alors, au lieu d'aller tout droit et de continuer la rue Legendre avec la précision d'un GPS humain, j'ai opté ce jour-là pour un détour. Quelques rues plus loin, et voilà, blotti contre les voies de la gare St-Lazare, le square des Batignolles. Un jardin très parisien avec sa fausse cascade, sa fausse rivière, ses fausses rambardes en faux bois de béton armé.
Un détour.
A cette heure, seules quelques mamans et étudiants désœuvrés se promènent ici. Un clodo sur un banc. Les canards roupillent sous un magnifique prunus chargé de fleurs roses. Les pare-terres tirés au cordeau débordent de narcisses, pensées, tulipes. Il fait frais. Tranquille.


Soudain, la journée me paraît pleine de promesses.

Je pousse le portail en métal au vert écaillé pour retrouvé l'agitation d'un 17ème populaire. Un détour, un peu de temps perdu sur le parcours chronométré. La moyenne prend un coup.

Je crois que la prochaine fois, s'il fait beau, je retournerai voir si les pétales sont tombés...


Fleurs et plumes

Chant

Jumeaux

Contorsionniste

Au dessus de la mêlée

Dodu

Rêves de verre

O-Hanami... au bord de l'eau

11 avril 2012

Defi lecture Images du Japon : les lectures de mars



Les beaux jours de mars ont plus incité aux promenades qu'à la lecture. Et le nombre de participants au défi lecture "Images du Japon" est réduit pour ce mois.

Vous trouverez :

- de la bd satirique et tendre avec le second tome de Mes voisins les Yamada de Hisaishi Ishii chez Kyoko

-  du manga au cœur de la campagne japonaise avec Nana-Monja de Shizuka Ito chez Nathalie. D'ailleurs, il faut que j'aille mettre mon nez dans cette série !

- de la poésie avec le recueil d'Haiku de Sôseki dans l'étang

Le challenge est ouvert à tous les passionnés et il se terminera fin septembre. Cela vous laisse largement le temps de vous inscrire si vous êtes tentés !

10 avril 2012

Le printemps dans l'étang : renouveau visuel

Non, vous ne rêvez pas !

C'est bien une nouvelle bannière avec une grenouille accorte qui vous accueille dès aujourd'hui sur ce blog.  Les plus assidus ou les plus observateur se souviennent peut-être de l'avoir déjà croisé une fois, en septembre.

Ce nouveau design plus lâché et plus japonisant a été crée par ma super amie >Virginie Blancher toujours au taquet quand il s'agit de faire illustrations, icônes, identité couleur...

Je tiens à la remercier très chaleureusement !

Le changement, le ménage dans les données virtuelles, le tri... voilà des activités bien dynamiques.
La saison s'y prête.
Après tout, au Japon, le mois d'avril est aussi synonyme de rentrée scolaire, une période que je trouve particulièrement motivante. Alors, c'est le moment de faire un peu de vide, de place pour les projets. Se tourner vers la vie.

Je vous encourage donc à regarder ce qui se passe dans les colonnes du blog, de part et d'autre du texte. A gauche, vous trouverez de quoi fouiner dans les archives et, à droite, vous avez  en lien direct écriture et photos en cours d'élaboration.

Bonne lecture, et merci à tous de venir tremper un orteil dans mon étang. 




9 avril 2012

G comme gourmandise


Gourmandise , d'après Larousse.fr : nom féminin. Caractère, défaut du gourmand.
Gourmand : Qui est amateur, friand de quelque chose. Qui est avide, passionné de quelque chose.

Si le plaisir de manger est décuplé lorsqu'il est partagé avec ceux qu'on aime, autour d'une table joliment dressée, avec des mets préparés avec soin et attention, il existe aussi un plaisir solitaire. Un plaisir de gourmand.

Lorsque je voyage en train, je me prépare toujours un bento.
J'aime le déguster, tranquillement, les yeux rivés sur le paysage ou sur les pages d'un livre. Les oreilles baignées de musique ou alors tendus à l'affût des paroles d'un livre audio en anglais. Je suis coupée du monde, des autres passagers. Mon espace se définit par un accoudoir, une tablette, je profite du repas pour songer au séjour à venir ou au séjour passé. Songer à ceux que je quittent, ceux que je retrouvent.
Un instant paisible. Avec les baguettes, le roulis du wagon oblige à plus d'attention. Plus de patience. Ainsi, le temps s'étire et passe agréablement, sans l'attente agacé et l'envie dévorante d'être enfin arrivé à destination.
Souvent, quand je sens la faim poindre, je l'ignore un peu. Quand elle est bien là, tenace, logée au creux du ventre, je pose mon bento. Un joli sac ou un furoshiki noué.



D'abord, sortir une petite bouteille d'eau pétillante, les baguettes et une serviette. Parfois, une clémentine ou un biscuit en guise de dessert. Et puis, j'ôte le couvercle avec soin.
Autour de moi, plus rien n'existe.
Ni les bruits des enfants qui piaillent, qui l'impoli accroché à son téléphone mobile, ni le casque audio ouvert qui déverse son mauvais son comme on vomit des insultes. J'ignore les regards surpris ou curieux. Voilà des années que je me prépare des bento pour les voyages. Depuis, ces boites japonaises sont devenus à la mode. Pour moi, elles sont juste indispensables et pratiques.

Doucement, je pioche ma pitance.

En général, une base de riz accompagné de poisson ou de viande. Et puis, un peu de crudités et parfois une salade de fruits. Si je pars de la maison, mon bento est plus élaboré puisque j'ai dans mes placards tout les ingrédients nécessaires. Souvent, quand je reviens de chez mes parents qui vivent sur la Côte d'Azur, mes bento sont plus occidentaux, comme sur ces photos.
 




Il me faut une bonne demi-heure, parfois même une heure entière pour déguster le contenu des deux étages bien remplis. Je mange toujours lentement.
Encore plus quand je voyage.
 Je lis quelques pages, observe le ciel changeant et les nuages qui courent à la fenêtre. J'écoute ce morceau de piano que j'aime tant. Encore une fois. Le temps s'étire et se rétracte au rythme des baguettes que je porte à mes lèvres. Une fois le repas achevé, je fais un brin de ménage.
J'essuie le bois avec un mouchoir en papier puis je nettoie le fond du bento. Je range tout dans son petit sac. Repue, je reprend ma lecture, un peu somnolente.


A l'arrivée, quand on me demandera si le voyage c'est bien passé, j'oublierai les petits désagréments pour songer au sympathique repas bien au chaud dans mon estomac.