9 novembre 2012

La formule préférée du professeur par Yoko Ogawa : lire sans compter !


Des mathématiques et du base-ball. Deux sujets dont je me contre-fiche totalement. Et pourtant, avec son talent discret, son style fluide, sa retenue, Yoko Ogawa m'a captivée avec La formule préférée du professeur. Un livre un peu différent de ce qu'elle écrit d'habitude, plus léger.

D'étranges amis

Une aide ménagère, mère célibataire, se retrouve engagée auprès d'un professeur de mathématiques d'une soixantaine d'années. Cet homme vit seul, reclus dans une petite maison construite à l'écart sur la propriété de sa belle-sœur, une veuve élégante mais très distante. Elle explique que l'homme, suite à un accident, à une mémoire immédiate limitée à 80 minutes. Pour lui, le temps s'est arrêté en 1975.

L'ouvrage raconte les interactions entre la femme de ménage, son fils de dix ans surnommé Root (de racine carré) et cet homme à l'esprit vif. Une relation étrange se tisse entre ses trois personnages qui tentent de survivre aux aléas de la vie.
Le professeur d'une pédagogie douce et aimable considère les nombres comme ses amis, et il a pour les enfants la plus grande affection. Alors, même si au bout de 80 minutes la bande de sa mémoire est effacée et rembobinée, quelque chose perdure.
Une étrange amitié, une entraide, une solidarité qui défie la loi d'un oubli inéluctable naissent peu à peu.

Ogawa nous compte avec son style inimitable à la fois minimaliste et exhaustif sur les sujets cruciaux, le quotidien de ces êtres qui trouvent un équilibre malgré les fêlures. Mathématiques et base-ball deviennent des raisons de vivre, de communiquer. S'y intéresser est un pas vers l'autre. Un moyen d'aimer.

La poésie de l'obsession

Là où Haruki Murakami excelle dans l'irruption du fantastique ou de l'onirique dans le réel, Ogawa, elle, confère au quotidien une dimension obsessionnelle et pourtant, très poétique. Elle manie le non-dit dans l'étrange et même parfois la perversion avec virtuosité. Souvent ses personnages développent aussi des manies de collection plus ou moins bizarres. Elle délaisse les descriptions des lieux pour se concentrer sur l'essentiel, les sentiments et surtout le fonctionnement de la psyché.

Pourtant, elle ne tombe jamais ni dans le mélo ni dans l’excès d'émotion. Il y a toujours une distance polie, comme si ses protagonistes étaient un peu anesthésiés, un peu perdus. Ce sont les objets ou les concepts qui les rapprochent et les ancres dans la vie. C'est par les cartes de base-ball que Root montre au professeur à quel point il est important pour lui. Et malgré sa mémoire défaillante, le message est compris. Quand aux nombres, ils révèlent entre ces pages une vie joyeuse et belle, loin de l’aridité redoutée et de l'aura de poussière que l'on associe souvent aux mathématiques.

Traduit avec brio par Rose-Marie Makino-Fayolle, pour les éditions Actes-Sud, La formule préférée du professeur est un roman émouvant, surprenant par sa capacité à nous happer sur un sujet pointu et, pour moi vraiment pas sexy. On retrouve entre les lignes la complexité de la culture japonaise, ses contrastes et sa finesse.
Un livre de plus qui ne quittera mes étagères que pour être prêté ou relu !

3 commentaires:

  1. Oui je l'ai lu aussi il y a quelques annees ! c'est un livre tres touchant ! il y a un film egalement (mais je doute qu'il soit traduit)

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  2. Yoko Ogawa est l'une de mes auteurs préférés. Meme si ce livre n'est pas mon préféré, j'ai quand meme été transportée très loin quand je l'ai lu. Ca me donne envie de lire encore plus d'Ogawa !

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  3. C'est justement le seul livre de Yoko Ogawa que je n'ai pas fini, que j'ai trouvé très long.
    A propos de mathématiques, je viens de terminer un polar de Keigo Higashino intitulé : Le dévouement du suspect X qui est tout simplement fabuleux.

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Il s'affichera un peu plus tard, après sa validation.

Marianne